Basées respectivement à Lille et à Nantes, OpenIO et Rozo Systems, toutes deux dans la mouvance Software Defined Storage (SDS), se sont installées à San Francisco pour attirer de grands clients et accéder à de nouvelles sources de financement.
OpenIO et Rozo Systems ne sont pas vraiment des startups même si elles en ont les caractéristiques. OpenIO a été créée en 2015 à Lille avec siège social installé à Hem dans le Nord-Pas de Calais, mais l’idée de la solution originelle remonte à 2006 lorsque des ingénieurs d’Atos Worldline développent une solution de stockage et d’archivage de messagerie pour Orange et SFR. Le développement démarre en 2007 avec une première solution en production pour SFR dépassement 1 Po en 2009. En 2012 la solution passe en mode Open Source à la demande d’Orange et en 2015 un fork est créée par OpenIO qui se lance alors dans l’aventure. Fondée en juin 2015, la société est venue s’installer à San Francisco et vise une première levée de fonds au 1er semestre 2016 « sans pour autant être pressée par le temps, précise Georges Lotigier, car nous avons des capacités de financement internes ».
OpenIO fait partie du groupe Okto Group qui peut être considérée comme une sorte de holding de lancement de startups. Dirigée par Georges Lotigier, Okto Group a déjà à son actif, Vade retro, un éditeur d’antivirus et d’antispam, et Scalair, une société de services spécialisée dans les systèmes d’information agiles. Scalair est indépendant d’OpenIO mais joue un rôle de partenaire de service, en proposant notamment des solutions en mode cloud.
OpenIO appartient à la mouvance de ce que l’on appelle aujourd’hui le Software Defined Storage et développe une solution logicielle de stockage objet en mode distribuée. Elle vise principalement des grands fournisseurs de services Internet, hébergeurs, opérateur télécom… à qui elle propose une solution on-premise pour des applications de stockage de messagerie mais entend couvrir d’autres domaines la santé (archivages d’images ou de vidéos) ou les médias (streaming vidéo). Forte de 16 personnes, elle fait de plus de 50 millions d’utilisateurs de messagerie. « Nous entendons être un acteur de rupture dans la gestion du stockage tout comme Docker l’a été dans le domaine de la virtualisation », explique Georges Lotigier. Selon IDC, le marché du stockage objet devrait passer de 1,2 milliard de dollars à 4,8 milliards en 2020.
Parmi les concurrents dans le monde du stockage objet qui ont retenus l’attention du Gartner, on peut citer Amplidata AmpliStor, Caringo CAStor, Cleversafe dsNet d’IBM, DataDirect Networks WOS, Atmos et Centera d’EMC, Hitachi Data Systems HCP, NetApp StorageGrid, OpenStack Swift et le français Scality ROS.
Pour OpenIO, le stockage objet représente le futur du stockage dont il devrait couvrir la plus grande partie en offrant la capacité de gérer de très grandes capacités de stockage pour les données non structurées – qui sont largement majoritaires – avec un TCO optimisé et un prix au Go faible. Elle mesure (voir ci-dessous) sa solution aux 7 caractéristiques proposées par le Gartner[1]. La solution serait particulièrement performante pour des configurations gérant un très grand nombre d’objets et parce qu’elle ne nécessite pas de réorganisation des données au fur et à mesure que la solution croît.
Le design de la solution s’appuie sur 4 grands piliers : un système d’annuaires, une approche de type réseau de nœuds, une intelligence du système baptisé « conscience » et une approche orienté IO et de l’application baptisé app for grid. La conscience fonctionne en mode asynchrone et peut optimiser la répartition des métadonnées sur les différents nœuds. Le système stocke les métadonnées dans des conteneurs qui donnent accès aux données proprement dites. OpenIO repose sur une plate-forme distribuée et supportent les API d’Amazon S3 et OpenStakc Swift. Il fonctionne avec différentes distributions Linux (Red Hat, Debian, Ubuntu…). Une des forces que revendique OpenIO est que sa solution peut démarrer avec des volumes de données modestes et qu’elle est fortement scalable sans remise en cause de l’existant et avec des performances linéaires. Comme tout éditeur Open Source, OpenIO se rémunère sur la commercialisation de modules spécifique et des services de support (Standard 24/7 et Premium pro-active).
Rofo FS, compromis entre performance et scalabilité
« Rozo Systems vise des applications de stockage nécessitant à la fois performance et scalabilité, résume Michel Courtoy, COO de l’entreprise, avec l’objectif de fournir le meilleur compromis. Les clients d’Isilon adopteront RozoFS s’ils ont besoin de plus de performances, ceux de NetApp la retiendront parce qu’ils sont à la recherche d’une meilleure scalabilité ».
Rozo Systems se présente comme un fournisseur de Scale out Nas (stockage de données extensible). La solution qu’elle a développée s’appuie sur la transformée Mojette[2], un outil mathématique développée au sein de l’Institut de Recherche en Communications et Cybernétique de Nantes (IRCCyN), une unité de recherche du CNRS rattachée à l’Ecole Centrale de Nantes et à l’université. C’est Pierre Evenou, chercheur à l’IRRCyN, qui préside désormais aux destinées de l’entreprise qui compte une dizaine de salariés et fait état de 10 clients payants.
Ses applications dans le stockage remontent aux années 2005 et en 2010 la société est créée avec une première solution commerciale en 2013 sous l’appellation RozoFS. De nombreuses solutions concurrentes utilisent le code de Reed Solomon[3].
Une des avantages de RozoFS est qu’elle source de gain d’espace de stockage avec la particularité que les données peuvent répartis sur différents systèmes de stockage de manière sécurisée car chacune des morceaux de données est inutilisable isolément. Il faut reconstituer l’ensemble pour récupérer l’information contenue dans les données. RozoFS intègre en outre des fonctions de redondance optimisée basée sur la méthode dite d’Erasure Coding (protection des données). Il suffit seulement d’un espace de 1,5 le volume initial pour bénéficier de cette redondance et sans trop pénaliser les performances. Par rapport aux systèmes concurrents comme ISA-L (Intelligent Storage Acceleration Library) d’Intel, Rozo Systems prétend être 2 à 3 fois plus rapide.
L’entreprise est venue s’installer il y a quelques mois à San Francisco pour développer une activité aux Etats-Unis et aussi pour trouver de nouvelles sources de financement. Cette internationalisation sur une levée de fonds de 700 000 euros au début 2015. La société fait état de deux benchmarks avec deux grands studios et espère être en situation de pouvoir opérer une nouvelle levée de fond pour assurer le développement de l’entreprise. Elle espère lever entre 5 et 10 millions de dollars. En tous cas, elle a déjà une roadmap produits bien définie pour les deux ans à venir.
Parmi les applications visées, Pierre Evenou prend l’exemple du Cloud DVR, de la post-production vidéo et du MPC. Le cloud DVR est un bon exemple d’une technologie qui va remplacer le stockage vidéo en local sur des box d’opérateurs et qui apportera les avantages du cloud tant pour les fournisseurs que pour les utilisateurs. L’application de base est disponible en mode open source sur GitHub et Rozo Systems commercialise des versions avancées payantes.
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[1] Capacity, Efficiency, Interoperability, Manageability, Performance, Resiliency, Security
[2] La transformée Mojette est une application de la géométrie discrète. Plus précisément, c’est une version discrète exacte de la transformée de Radon (Théorème de Radon). La première caractéristique de la transformée Mojette est de n’utiliser que des additions et des soustractions. De plus, celle-ci est redondante. La transformée Mojette a déjà été utilisée dans de nombreux domaines d’application dans les problématiques du traitement du signal.
[3] Le code de Reed-Solomon est un code correcteur basé sur les corps de Galois dont le principe est de construire un polynôme formel à partir des symboles à transmettre et de le suréchantillonner. Le résultat est alors envoyé, au lieu des symboles originaux. La redondance de ce suréchantillonnage permet au récepteur du message encodé de reconstruire le polynôme même s’il y a eu des erreurs pendant la transmission.
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