L’enseigne mythique de distribution informatique, rachetée en 2009 par Hughes Mulliez au groupe PPR, vient de déposer son bilan, asphyxiée par ses pertes opérationnelles et l’évaporation de ses encours.


On croirait à un mauvais canular tant la nouvelle paraît inconcevable. Surcouf, l’enseigne créée par Olivier Dewavrin, qui a longtemps fait figure de référence absolue en matière de distribution informatique grand public, vient de se déclarer en cessation de paiements. Une demande de mise sous protection judiciaire vient d’être déposée ce jour par Hughes Mulliez, son PDG et principal actionnaire, auprès du tribunal de commerce de Lille. Une procédure de redressement judiciaire devrait être ouverte dans les prochains jours afin de déterminer si l’enseigne peut poursuivre ses activités et dans quelles conditions.

Des signes annonciateurs

Si pour beaucoup la surprise est totale, néanmoins les signes annonciateurs se sont accumulés ces derniers mois. Ainsi, selon un fournisseur, l’enseigne a progressivement perdu une grande partie de ses encours à partir du printemps dernier. Ce qui n’a pas tardé à occasionner des ruptures d’approvisionnement sur un nombre de plus en plus important de marques et de fournisseurs. Les représentants du personnel citent notamment Banque Magnétique, LaCie, Sony et tout dernièrement Western Digital.

Autre élément alarmant : les pertes de 34 M€ (sur 160 M€ de CA) enregistrées sur l’exercice 2010-2011 – toujours non publié – et la recapitalisation de 20 M€ qui a suivi à l’automne dernier. Des pertes elles-mêmes précédée d’un résultat net négatif presqu’aussi important (26,5 M€) sur l’exercice précédent. Plus inquiétant, malgré le plan social de l’été 2010, qui s’était traduit par le licenciement 174 salariés, et la fermeture l’été dernier de deux magasins (Belle Epine et Strasbourg) sur huit, ayant entraîné 40 départs supplémentaires, les dirigeants avaient prévenu que l’activité resterait déficitaire cette année.

Des errements stratégiques

Dans un communiqué, l’intersyndicale CFTC-CGT-CFE-CGC et le Comité central d’entreprise pointent les errements stratégiques et les erreurs de gestion du PDG. Ils dénoncent notamment les 174 licenciements de 2010, qui ont visé des personnes détenant pour la plupart le savoir-faire de l’entreprise, sacrifiés non pour des motifs économiques mais pour imposer une nouvelle politique salariale. En cause également, les investissements dans le nouveau siège social de Lille, l’échec de la migration vers un nouveau système d’information, le changement improvisé de plate-forme logistique…

Aucune information n’a filtré sur le montant du passif ni sur les pertes d’exploitation. On ne sait pas non plus quelles sont exactement les intentions de Hughes Mulliez. Selon nos informations, il préparerait un plan de continuation d’activité par apurement de la dette basé sur une évolution du modèle de vente. Son scénario prévoirait de supprimer la plus grande partie du stock en magasin et d’y déployer des bornes interactives permettant d’accéder au catalogue. Les salariés, officiellement au nombre de 500 – probablement beaucoup moins [*] – pourraient avoir à subir une nouvelle salve de licenciements.

 

[MAJ du 2/03/12] : Surcouf a confirmé hier dans un communiqué avoir obtenu l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire du Tribunal de commerce de Lille. Une démarche rendue nécessaire par « la rupture du crédit fournisseur dont bénéficiait la société ».

[*] : Dans un article daté du 1/03/12 citant Hughes Mulliez, Les Echos fait état d’un effectif de 450 personnes.